Si le juge administratif « annule » les autorisations entachées d’illégalité dont il est saisi dans le cadre d’un recours pour excès de pouvoir ; l’autorité d’urbanisme – le Maire – est en droit de « retirer », dans les trois mois de leur délivrance tacite ou explicite, les décisions de non- opposition à déclaration préalable et les permis entachés d’illégalité (article L. 424-5 du Code de l’urbanisme1).
Le « retrait », comme l’« annulation » ont un effet rétroactif. Les autorisations d’urbanisme retirées ou annulées sont expulsées de l’ordonnancement juridique, et supposées n’avoir jamais existé.
L’article L. 211-2 du Code des relations entre le public et l’administration (CRPA) – entré en vigueur le 1er janvier 2016 – décrit la procédure de motivation devant accompagner les décisions administratives individuelles défavorables, telles que le retrait d’une autorisation d’urbanisme, tacite ou explicite :
« Les personnes physiques ou morales ont le droit d’être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent.
À ce effet, doivent être motivées les décisions qui :
(…)
4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ;
(…)
Quant à l’article L. 211-5 du même Code, il précise que « la motivation exigée par le présent Chapitre doit être écrite et comporter l’énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ».
En amont, l’article L. 121-1 du CRPA, reprend le principe du caractère du contradictoire de la procédure inhérente aux décisions individuelles – en l’occurrence, la décision de retrait d’une autorisation d’urbanisme au motif de son illégalité – de feu l’article 24 de la loi n° 2000- 321 du 12/04/2000, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, comme suit :
«(…) les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l’article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d’une procédure contradictoire préalable ».
1 – 1ère phrase de l’art. L. 424-5 du Code de l’urba. : « La décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire ou d’aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s’ils sont illégaux et dans le délai de 3 mois suivant la date de ces décisions ».
Articulation de l’article L. 424-5 du Code de l’urbanisme et des principes de motivation et de contradictoire du CRPA
Dans un arrêt du 30 décembre 2015, Société Polycom (req. n° 383.264), le Conseil d’Etat considère « qu’eu égard à la nature et aux effets [du] retrait [d’une autorisation d’urbanisme] le délai de 3 mois prévu par l’article L. 424-5 du Code de l’urbanisme oblige l’autorité administrative à mettre en œuvre cette décision de manière à éviter que le bénéficiaire du permis ne soit privé de cette garantie ».
Autrement dit, la régularité de la procédure suppose que, dans la période de 3 mois, l’autorité d’urbanisme offre au bénéficiaire de l’autorisation d’urbanisme devant être retirée un délai suffisant pour présenter ses observations.
Dans l’espèce soumise à son contrôle, le Conseil d’Etat considère que le Maire de la Commune de Hure a failli au respect du principe du contradictoire.
Par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR) le Maire informe la Société Polycom de son intention de retirer le permis de construire un bâtiment agricole à toiture photovoltaïque et lui impartit un délai de 10 jours pour présenter ses observations.
Jusque-là, tout va bien. La difficulté tient au point de départ du délai de 10 jours.
Selon le Conseil d’Etat, retenir la date à laquelle le pli (RAR) a été présenté au siège de la Société et non la date à laquelle le courrier (RAR) a effectivement été remis par La Poste à la Société – qui d’ailleurs « n’a pas négligé de venir retirer celui-ci à l’intérieur du délai de 15jours» prévu par l’article R. 1.1.6 du Code des postes et des communications électroniques – comme point de départ du délai de 10 jours d’observation révèle une violation du principe du contradictoire inhérent au retrait des autorisations d’urbanisme.
Le Conseil d’Etat annule donc, pour erreur de droit, l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Bordeaux du 30 mai 2014 rejetant l’appel de la Société Polycom.
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