À propos de l’arrêt CE, Cne d’Hyères,4.08.2021 : req. n° 433.761
Monsieur a tenu bon et n’a pas hésité à épuiser les voies de recours pour obtenir, enfin, le droit de restaurer sa bergerie du XIXème siècle à des fins d’habitation, sur le territoire de la Commune littorale d’Hyères (Var). Bergerie sise sur son unité foncière supportant un bâtiment principal à destination « habitation ».
Le Conseil d’Etat par son arrêt du 4.08.2022 enjoint le Maire à délivrer à Monsieur B le permis de construire sollicité dans un délai de 3 mois. La Commune est condamnée à lui verser 6.000 euros au titre de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative.
Si bien souvent les Maires, comme les Préfets, misent sur le découragement des propriétaires face à la lenteur de la justice et au cout financier de mener à terme leurs combats judiciaires en faveur de leur droit de construire, l’arrêt rendu par la Haute juridiction administrative est une lueur d’espoir.
Cette belle victoire juridique, emblématique du parcours du combattant de nombre de propriétaires – et de promoteurs – dans trop de Communes, mérite que l’on s’y attarde.
Faits :
Monsieur B. a déposé en Mairie un dossier de permis de construire visant la réhabilitation en habitation de sa bergerie. D’après la Notice descriptive du projet et des plans du dossier graphique, les travaux consistent en sa reconstruction à l’identique par la mise en place d’une nouvelle toiture, le confortement de la structure existante par des tirants formant chainage, des huisseries en bois et des volets.
Le 7.10.2011, le Maire d’Hyères oppose un refus de PC au visa du règlement du POS – exhumé suite à l’annulation du PLU – couvrant la zone 1NA.
Après le jugement du Tribunal administratif de Toulon, un premier arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille, un premier arrêt du Conseil d’Etat et un second arrêt de la CAA, Monsieur B. se pourvoit en cassation les 20 août et 21 novembre 2019.
Entre-temps, l’expertise judiciaire ordonnée par le TGI de Toulon rapporte, en 2014, que l’ancienne bergerie n’est pas à l’état de ruine, mais constitue une construction existante. Et pour cause, elle a conservé l’essentiel de ses murs porteurs, l’emplacement d’un conduit de cheminée reste visible, « les rives de tuiles sont pour l’essentiel encore présentes » et ses « murs porteurs en pierre sont dans l’ensemble en bon état ».
Pour démontrer l’illégalité de l’arrêté de refus de PC et la régularité du projet de Monsieur B., le raisonnement du Conseil d’Etat s’articule autour de 2 axes :
En premier lieu, le Conseil pose le principe selon lequel le respect de l’al. 2 de l’art. L. 111-3 du Code de l’urbanisme (désormais art. L. 111-23) – en vertu duquel « La restauration d’un bâtiment dont il reste l’essentiel des murs porteurs peut être autorisée, sauf dispositions contraires des documents d’urbanisme et sous réserve des dispositions de l’art. L. 111-11, lorsque son intérêt architectural ou patrimonial en justifie le maintien et sous réserve de respecter les principales caractéristiques de ce bâtiment » –, s’impose de plein droit et d’office à l’autorité d’urbanisme.
Selon l’arrêt : « Lorsqu’un projet répond aux conditions définies [par l’art. L. 111-23], il appartient à l’autorité administrative, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, de l’autoriser, y compris si le pétitionnaire ne s’en est pas expressément prévalu ».
Or, en l’espèce, le projet de Monsieur B. consiste bel et bien à restaurer l’ancienne bergerie « caractéristique du paysage et patrimoine architectural provençaux traditionnels ».
Le CE pose donc le principe selon lequel l’autorité d’urbanisme est contrainte d’autoriser la restauration d’un bâtiment au nom de l’intérêt architectural ou patrimonial servant l’intérêt général, dès lors que le PLU ne s’y oppose expressément pas.
En second lieu, le Conseil d’Etat précise que la restauration à l’identique d’un bâtiment ancien au titre de l’article L. 111-23 « ne saurait être regardée comme une extension de l’urbanisation » au sens de l’art. L. 121-8 du Code de l’urbanisme n’autorisant, en zone littorale, que « l’extension de l’urbanisation en continuité avec les agglomération et villages existants ».
Enfin, il est utile de rappeler le régime de la destination des bâtiments.
Le local accessoire « bergerie » a la même destination que bâtiment principal. Soit, la destination « habitation » (art. R. 151-29 du Code de l’urbanisme).
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