Confirmation des critères de la « domanialité publique »

À propos de l’arrêt CE, 22/05/2019, Association Les Familles A, B, C du Gard

Comme nous l’exposions dans les précédentes notes du Blog : Domaine public : virtuel ou réel ? et La « virtualité » investit la propriété publique, le Conseil d’Etat affine l’identification d’un immeuble au titre de la « domanialité publique virtuelle » dans son arrêt de principe Cne de Baillarques(CE, 13/04/2016 : req. n° 391.431).

Le caractère « domaine public » ou « domaine privé » d’un bien détermine le tribunal compétent, notamment, lorsqu’il s’agit d’enjoindre son occupant à le libérer. Juge administratif dans le premier cas, juge judiciaire dans le second.

En l’espèce, la Commune de Langlade a conclu – depuis 2012 – avec une association loi 1901, une convention de partenariat d’une durée d’un an renouvelable, mettant gratuitement à sa disposition les locaux accueillant la crèche parentaleLa Farigoulette.

Par courrier du 27 mars 2018, le Maire de Langlade informe l’association de sa décision de ne pas renouveler la convention de partenariat.

Par délibération du 5 avril 2018, le Conseil municipal décide d’instituer un service public communal d’accueil permanent et occasionnel de la petite enfance, dans les locaux municipaux jusqu’alors occupés par l’association Les Familles A, B, C du Gard, afin d’en confier la gestion à un tiers, dans le cadre d’une concession de service public. Et ce, à compter du 2 août 2018.

Par courrier du 16 mai 2018, le conseil de l’association aurait manifesté son intention de se maintenir dans les lieux après le 1eraoût 2018 et de faire obstacle à l’ouverture au public de la crèche municipale prévue le 27 août 2018.

La Commune décide donc de saisir le juge des référés administratifsdu Tribunal administratif de Nîmes, sur le fondement de l’art. L. 521-3 du CJA.

Par ordonnance du 27 juillet 2018,ce dernier fait droit à la demande de la Commune. Il enjoint l’association à évacuer les locaux municipaux à compter du 2 août 2018, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du 6 août 2018.

1°/ Le Conseil d’Etat, commence par reproduire le considérant de principe de son arrêt Cne de Baillarques

« Lorsqu’une personne publique a pris la décision d’affecter un bien qui lui appartient à un service public et que l’aménagement indispensable à l’exécution des missions de ce service public peut être regardé comme entrepris de façon certaine, eu égard à l’ensemble des circonstances de droit et de fait, telles que, notamment, les actes administratifs intervenus, les contrats conclus, les travaux engagés, ce bien doit être regardé comme une dépendance du domaine public »

Puis, il confronte sa définition du domaine public « virtuel » au local en présence, pour conclure :

Que les « locaux dans lesquels l’association exploitait une crèche et une halte-garderie, disposaient déjà des aménagements indispensables à l’activité de service publicdont la création avait été décidée. En retenant, eu égard à l’ensemble des circonstances de droit et de fait de l’espèce, que les locaux en cause pouvaient être regardés comme une dépendance du domaine public de la Commune de Langlade et que la demande de la Commune tendant au prononcé d’une mesure d’expulsion de ces locaux n’échappait pas manifestement à la compétence de la juridiction administrative, le juge des référés du Tribunal administratif n’a pas commis d’erreur de droit ».

L’erreur de droit se trouve ailleurs …

2°/ Le Conseil d’Etat sanctionne la précipitation avec laquelle la Commune a saisi le juge des référés et l’ordonnance faisant droit à sa requête.

Le 27 juillet 2018, la convention de partenariat n’était pas arrivée à son terme … « il ne ressort pas des pièces du dossier soumis au juge des référés que l’association aurait manifesté son intention de se maintenir dans les lieux après le 1eraoût 2018 et de faire obstacle à l’ouverture au public, prévue le 27 août 2018, du service public municipal d’accueil de la petite enfance ».

La Haute juridiction constate que le 27 juillet 2018 l’association occupait régulièrement les locaux en litige et conclut donc qu’« en estimant, par son ordonnance du 27 juillet 2018, que les conditions d’urgence et d’utilité requises par l’art. L. 521-3 du CJA étaient satisfaites compte tenu de l’opposition manifestée par l’association et des nécessaires liées à l’ouverture prochaine de la crèche municipale, le juge des référés a dénaturé les pièces du dossier ».

L’ordonnance d’expulsion est donc annulée …

Au final, si les procédures de référés – tant civiles qu’administratives – sont précieuses, elles doivent néanmoins être manipulées avec de grandes précautions. Faute de quoi elles se révèlent contre-productives.

Trop tôt, l’urgence n’est pas démontrée. Trop tard, l’urgence faillit …

L’arrêt du Conseil d’Etat est un coup dur pour la Commune de Langlade. 

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