Décompte des majorités de l’article L. 442-10 du Code de l’urbanisme aux fins de modification des documents du lotissement

L’article L. 442-10 se contente d’affirmer que « lorsque les 1/2 des propriétaires détenant ensemble les 2/3 au moins de la superficie d’un lotissement ou les 2/3 des propriétaires détenant au moins les 1/2 de cette superficie le demandent ou l’acceptent, l’autorité compétente peut prononcer la modification de tout ou partie des documents du lotissement, notamment (…) du cahier des charges s’il a été approuvé ou les clauses de nature réglementaire du cahier des charges s’il n’a pas été approuvé ».

Et ce, dans la mesure où cette « modification [est] compatible avec la réglementation d’urbanisme applicable » sur le territoire communal.

« Le demandent ou l’acceptent » …

Une majorité qualifiée peut « seule » demander et mener à bien une opération de modification, sans que la totalité des colotis ait pour autant été avertie d’un tel projet …

Par contre, « l’acceptation » renvoie à l’hypothèse où le ou les colotis à l’origine du projet de modification provoque la réunion, sollicite(nt) l’ensemble des colotis afin de leur soumettre ledit projet

Dans tous les cas, la procédure de modification suppose d’être entérinée par l’autorité d’urbanisme (le Maire).

La jurisprudence confirme qu’il n’existe aucun formalisme particulier opposable aux colotis et à l’autorité d’urbanisme, tant que les majorités qualifiées sont bel et bien respectées …

Dès lors, pour recueillir les majorités qualifiées il est possible, au choix, de :

  • faire du porte à porte ;
  • d’envoyer, en recommandé, un courrier « à choix multiples » : accord / refus du projet de modification dûment décrit ;
  • réunion extraordinaire des colotis par l’ASL, …

Attardons-nous sur le calcul des majorités.

Deux éléments à retenir la « superficie du lotissement » et les « propriétaires ».

  • Comment doit être entendue la notion de « superficie d’un lotissement » utilisée par l’article L. 442-10 ?

l’entière assiette foncière du lotissement en ce y compris les voies et espaces communs

ou

exclusivement l’assiette des lots « privatifs » du lotissement ?

La 3ème chambre civile de la Cour de cassation est expressément venue clarifier ce point, dans un arrêt du 3 octobre 2001 (pourvoi n° 00-10550 ; Bull. civ. III, n° 113) :

« attendu (…) qu’ayant, par motifs propres et adoptés, constaté que la résolution litigieuse avait été approuvée par 79,43 % des propriétaires, 79,82 % des lots et 77,92 % de la superficie des lots, la cour d’appel a retenu, à bon droit, que les voies, espaces verts, libres ou autres du lotissement devaient être exclus du calcul de la majorité et en a exactement déduit que la majorité requise par l’article L. 315-3 était atteinte ».

  • Comment doit être compté l’avis des « propriétaires » : par lot ou par « tête ».

Selon la Cour de cassation, le nombre des propriétaires est décompté par lots.

Autrement dit, une même personne qui serait propriétaire de plusieurs lots, dispose d’autant de voix que de lots (C.Cass. 3ème civ., 17/07/1973, Epoux Larget c/ SCI, 231, av. Bollée et a. : D. 1973, jurisp. p. 758 et s.).

Par contre, selon le conseil d’Etat, chaque propriétaire ne compte que pour une seule voix, même s’il possède plusieurs lots. Le critère retenu est celui de la qualité ou non de propriétaire d’un lot dans le lotissement (CE, 13/06/1975, M. Amarger : Lebon 1975, p. 358 ; CE, 7/01/1991, Cne de Cruis c/ M. Moulin : req. n° 89.380 ; CE, 16/12/1992, M. Guntz : req. n° 92.859 ; CE, 23/07/1993, Consorts Brown : req. n° 103.670 ; CE, 28/02/1996 et CE, 5/03/1999, SCI Tennis Park : req. n° 105.846).

Dans la mesure où le juge administratif est compétent pour apprécier la légalité de la décision administrative autorisant la modification des documents du lotissement, il y a tout lieu de tenir le plus grand compte de sa lecture de l’ancien article L. 315-3, abrogé et remplacé par l’article L. 442-10, du Code de l’urbanisme.

De l’application des dispositions de l’article L. 442-10 lorsque l’un ou plusieurs des lots du lotissement supportent un bâtiment ou un ensemble de bâtiments gérés en copropriété.

Selon le Conseil d’Etat (CE, 5/12/1973, Sieur Deburghraeve c/ Epoux Ayoub : req. n° 85.896 ; AJPI 1974, p. 909 et 910)[1], « pour l’application des dispositions de – l’article L. 442-10 du Code de l’urbanisme –, les copropriétés doivent être regardées comme des « propriétaires » et peuvent dès lors émettre un avis sur un projet de modification du cahier des charges ».

Autrement dit, quand un lot est soumis au régime de la copropriété (ou est indivis entre plusieurs personnes), il ne dispose que d’une voix.

À charge donc pour les copropriétaires, en assemblée générale, de mandater leur syndic pour donner leur accord / refus au projet de modification du cahier des charges.

[1] – Arrêt rendu sur le fondement de l’ancien article 38 de la loi du 30/12/1967 ancêtre de l’ancien article L. 315-3, actuel L. 442-10 du Code de l’urbanisme.

CABINET DUCOURAU & AVOCATS
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