À propos de l’arrêt Cass. 3ème civ., 4.04.2024 pourv. n° 22-21.132
Faits et procédure
Monsieur K. a obtenu le permis de construire un bâtiment d’habitation sur sa parcelle contigüe à celle de Madame U.
Plus précisément, Monsieur K. a obtenu deux PC, l’un en 2008 autorisant l’édification d’un bâtiment nouveau d’une hauteur de faîtage de 6 m et 4 m à l’égout. Le tout à partir du terrain naturel. L’autre en 2015, autorisant – dans une perspective d’aménagement du sous-sol – une hauteur de 6,32 m au faîtage et 5,43 à l’égout par rapport au terrain naturel.
Seulement, le bâtiment achevé de Monsieur K. mesure 7,02 m au faîtage et 6,26 m à l’égout.
Soit, une construction qui n’est conforme à aucun des deux PC en présence.
Madame U. se plaint – à l’aune des photographies versées et de l’ensemble des constats effectués par son expert et l’expert judiciaire – du préjudice inhérent à la construction irrégulière de Monsieur K., la privant d’une grande partie de la vue panoramique dont elle jouissait sur la côte et le littoral Ouest, de la limitation de l’ensoleillement dont elle bénéficiait jusque-là et de la réduction de luminosité de l’une des pièces à vivre de sa villa.
Après avoir rappelé que « le trouble anormal de voisinage résultant d’une perte d’ensoleillement ou de vue peut donner lieu à une demande en réparation lorsqu’il excède les inconvénients normaux de voisinage », la Cour d’appel de La Réunion (17.06.2022 ; RG n° 21/00111) condamne sous astreinte Monsieur K. à déplacer sa haie de palmiers à une distance de 2 m au moins de la limite séparative des deux fonds violant les dispositions de l’art. 671 du Code civil. Elle juge que Madame U. « a perdu l’usage d’une partie de la vue panoramique dont elle jouissait depuis son fonds avant que Monsieur K. n’édifie sa construction, au mépris du PC qui lui avait été accordé ». Enfin, que la preuve est rapportée d’une diminution de l’ensoleillement en fin de journée et de la luminosité dans la cuisine, venant s’ajouter à la réduction de la vue en raison de l’ombre portée par la toiture et de l’écran que forme la haie de palmiers. Soit, « un préjudice de jouissance dont [Madame U.] est légitime à demander réparation ».
La Cour condamne Monsieur K. à mettre sa construction en conformité avec les prescriptions du PC qui lui a été accordé en 2015, ainsi qu’à déplacer sa haie de palmiers plantées à une distance de 2 m au moins de la ligne séparative. Le tout sous un délai de 6 mois et sous astreinte.
Position de la 3ème chambre civile saisie du pourvoi de Monsieur K.
Après avoir affirmé que le juge du fond, statuant en matière extra-contractuelle, « ne peut apprécier la réparation due à la victime au regard du caractère disproportionné de son coût pour le responsable du dommage », juge au visa de l’article 1240 du Code civil que la Cour d’appel a exactement énoncé que « la demande de démolition ne pouvait prospérer qu’à condition d’établir que la construction édifiée en violation des prescriptions du PC avait causé un préjudice direct au voisin ».
En l’espèce, non seulement il a été judiciairement établi que la construction de Monsieur K. est bien irrégulière puisque édifiée en violation du PC, mais en sus Madame U. démontre les préjudices trouvant leur source dans une telle irrégularité : « la construction réalisée par Monsieur K. privait sa voisine d’une grande partie de la vue panoramique sur la côte et le littoral Ouest, limitait l’ensoleillement dont elle bénéficiait et réduisait la luminosité de l’une des pièces à vivre de sa maison »
La Cour de cassation en conclu que le préjudice résultant directement de l’irrégularité de la construction a légalement conduit la Cour d’appel à déduire que la démolition de la construction, dans les limites du PC, devait être ordonnée.
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