À propos de l’arrêt Cass. 3ème civ., 11.01.2024 : pourv. n° 22-21.126
La Commune à l’origine du pourvoi près la Cour de cassation a décidé, par délibération et au visa de l’article L. 631-7 du Code de la construction et de l’habitation (CCH) de soumettre à autorisation préalable le changement d’usage des locaux destinés à l’habitation en meublés de tourisme.
Ledit article, en son alinéa 2, précise que « constituent des locaux destinés à l’habitation toutes catégories de logements et leurs annexes, y compris les logements-foyers, logements de gardien, chambres de service, logements de fonction, logements inclus dans un bail commercial, locaux meublés donnés en location dans les conditions de l’art. L. 632-1 ou dans le cadre d’un bail mobilité (…) ».
Selon l’alinéa 3, « un local est réputé à usage d’habitation s’il était affecté à cet usage au 1.01.1970 ».
Enfin, le dernier alinéa prévoit que « le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile constitue un changement d’usage au sens du présent article ».
En l’espèce, la SCI Senedec est propriétaire d’un local sis au 5ème étage d’un immeuble à destination d’habitation loué à Monsieur T. Ce dernier, nous présumons avec l’accord de son bailleur, se prête à une activité répétée de loueur en meublé de tourisme.
La Commune les a tous deux assignés près le TGI compétent en la forme des référés afin qu’ils soient condamnés au paiement d’une amende civile pour avoir changé l’usage du local en présence.
Par arrêt du 30.06.2022, la Cour d’appel de Paris a rejeté les demandes de la Commune au motif qu’elle ne pouvait se prévaloir d’un changement d’usage illicite au sens de l’art. L. 631-7 du CCH.
Dans son pourvoi près la 3ème chambre civile, la Commune produit une déclaration Cerfa modèle R remplie postérieurement au 1.01.1970, mais avant la date limite de dépôt fixée au 15.10.1970 pour les Communes de plus de 5.000 habitants.
Selon la déclaration déposée le 9.10.1970, les locaux situés au 5ème étage et postérieurement réunis, sont des « pièces de service ». La Commune en déduit et présume leur usage habitation au 1.01.1970.
La 3ème chambre civile de la Cour de cassation confirme les termes de l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 30.06.2022 et rejette la demande de la Commune.
Après avoir rappelé sa jurisprudence L. 631-7 – « la preuve que le local a été affecté à un usage d’habitation postérieurement à la date du 1.01.1970 est inopérante (3ème civ. 28.05.2020 : pourv. n° 18-26.366, publié) » et « une déclaration remplie postérieurement au 1.01.1970 ne permet pas d’en établir l’usage à cette date, ni de le faire présumer (3ème civ., 7.09.2023 : pourv. n° 22-18.101, publié), sauf mention de la location du bien et du montant du loyer en vigueur au 1.01.1970 » –, la Haute juridiction civile juge que « la Cour a relevé, à bon droit, que la fiche modèle R avait pour seul objet de décrire la situation de l’immeuble à la date de sa souscription, le 9.10.1970, ce seul élément ne permettant pas de déduire l’usage des lieux au 1.01.1970 ».
Le local de la SCI Senedec étant identifié, non pas comme une « habitation », mais comme des « pièces de service », la 3ème chambre en déduit que « les pièces produites par la Ville ne permettaient ni d’établir que le local litigieux était à usage d’habitation au 1.01.1970,ni qu’il avait ultérieurement donné lieu à des travaux ayant pour effet de lui conférer, en droit, un usage d’habitation ».
Autrement dit, à défaut pour la Commune de rapporter la preuve exigée par l’article L. 631-7 du CCH, selon laquelle le local litigieux aurait fait l’objet d’un changement d’usage illicite « d’habitation » en « meublé de tourisme », le tout en violation de son règlement municipal, le locataire pourra continuer à le louer sur les plateformes ad hoc à une clientèle touristique.
Reste la question de la destination au titre de la réglementation d’urbanisme et du respect des prescriptions du règlement du PLU, notamment en matière de création d’aires de stationnement …
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